Loin d’être cynique, l’univers des technologies a entrepris d’investir le secteur public et d’y insuffler une bonne dose de créativité. Aussi, il n’est plus rare de parler de ville intelligente, de système d’information intégré et de gouvernance des données lorsque l’on déambule dans les corridors de l’État. Par le fait même, les États investissent des milliards de dollars en technologie.
Il faut dire que l’enjeu est de taille pour les gouvernements. Non seulement l’intégration des technologies aux services publics est alignée avec les attentes des citoyens, mais elle constitue aussi une question d’efficience et d’efficacité, voire de légitimité. Après tout, pourquoi soutenir un État qui ne serait pas en mesure de faire ce qu’Amazon, Apple ou Google font depuis des années ? Pour y arriver, de nombreuses administrations publiques, dont le gouvernement du Québec, ont réalisé des investissements importants en faisant appel aux technologies, mais aussi en respectant la dimension humaine des services et de la gestion publics. Le design des services publics offre ainsi un potentiel nouveau, mais encore faut-il savoir le comprendre pour pouvoir l’exploiter.
Comme elles l’ont fait dans le domaine du commerce et de la consommation, les technologies ont un effet structurant sur la relation qu’entretiennent les États avec les citoyens. Cela demande donc un changement plus profond qu’un simple appel d’offres pour choisir un fournisseur de solutions… particulièrement lorsque l’on parle de transparence et de gouvernement ouvert. Ainsi, selon la chercheure Eva Sorensen de l’Université du Danemark : […] les efforts consentis afin d’augmenter la capacité du secteur public à mettre en œuvre des projets de collaboration innovante en matière de politiques nécessitent le développement d’un nouveau rôle pour les politiciens. On doit, par conséquent, se rappeler que l’innovation n’est pas qu’un résultat; il s’agit avant tout d’un processus. Pour les pouvoirs publics, cela met en scène obligatoirement une diversité d’acteurs qui doivent composer avec les contraintes de la gestion de l’État. Il faut donc savoir comment embrasser cette complexité – qui peut être l’ingrédient secret de la réussite – et la transformer en atout, tant pour les administrateurs de l’État que pour les entreprises du secteur des technologies.
Pour aborder ce sujet, le comité organisateur de la JIQ a choisi Theresa Pardo, directrice du Center for Technology in Governement de l’Université d’État de New York pour présenter une conférence sur l’innovation dans le secteur gouvernemental américain. Bien que les investissements soient importants, les technologies dans le secteur public sont rarement, toute proportion gardée, l’objet d’études de la part de chercheurs universitaires. Avec plus de 125 publications sur le sujet, madame Pardo est sans aucun doute de ceux qui ont décidé de remédier à la situation et de documenter la performance des différentes initiatives. Du nouveau service 311 de Philadelphie jusqu’aux systèmes de collaboration entre les différents paliers de gouvernement, en passant par les facteurs de succès des « gouvernements en ligne », la professeure aborde ainsi des cas pratiques, mais aussi les fondements mêmes du potentiel innovant des technologies dans le secteur public.
Reconnue à l’échelle mondiale comme étant l’une des personnes plus influentes en ce qui a trait aux gouvernements numériques, madame Pardo travaille étroitement avec les équipes provenant de plusieurs secteurs, et souvent, de plusieurs disciplines, pour appliquer au secteur public les recherches et les approches en résolution de problème. Au confluent des politiques, du management et de la technologie, son approche profite notamment du soutien des Nations-Unies et de la Banque Mondiale, et s’appuie sur les concepts du gouvernement ouvert, des données ouvertes, du gouvernement en ligne, des technologies mobiles et de la dimension humaine de la livraison des services.